iÉcrit inspiré du séminaire du Psychiatre et Docteur Bernard Tauber (03/1992)
I – L’Hypnose n’est pas forcément ce que l’on imagine.
Nombreux analystes se sont penchés sur l’hypnose. Elle les interpelle mais est aussi source de crainte pour eux. Dans un sens, ils la réfutent et dans l’autre, l’hypnose est de nouveau questionnée. Dans un premier temps, nous allons nous intéresser au rejet de l’hypnose traité par S. FREUD dans l’Introduction à la Psychanalyse (p. 427)
Nous pouvons constater que l’hypnose est un travail de mouvement, car, n’étant pas considérée comme une science, elle évoque davantage la magie, la sorcellerie ou même un désenvoûtement.
À mon avis, il était crucial de s’intéresser et de soulever de nouveau la question de la relation entre l’hypnose et la psychanalyse en 1992.
« C’est amplement moins que vous ne le pensez habituellement»
Jean GODIN (fondateur de Milton ERICKSON de PARIS) livre une définition de l’hypnose. (Encyclopédie médico-chirurgicale 1991)
L’hypnose est un modèle d’actions mentales, centré sur la psychologie, dans lequel un sujet parvient à ignorer la réalité qui l’entoure grâce à l’intervention d’un tiers tout en restant en contact avec ce dernier. Cette «déconnexion de la réponse du sujet (dans son propre aiguillage) au réel de l’extérieur», en supposant que le sujet se relâche, équivaut à un mode de fonctionnement que nous appelons état.
Cet “état” ouvre de nouvelles possibilités. Entre autre, d’autres alternatives pour la conscience d’avoir une influence directe sur le corps, ou une évolution psychologique effectuée inconsciemment.
Voir aussi : névrose ou psychose ?
Habituellement, dans l’environnement d’analyse, la référence de tous est l’hypnose pratiquée par BERNHEIM.
Cela renvoie à « vous dormez, je le souhaite, … vous n’aurez aucun symptôme ». L’hypnotiseur a des facultés et la possibilité de les utiliser pour le patient qu’il traite en suggérant directement.
ROUSTANG le précise (Influence p. 88) :
“L’hypnothérapie est violente car elle a tendance à recueillir immédiatement l’effet souhaité par celui qui la manipule, quelles que soient les circonstances particulières du patient. Il s’agit d’un court-circuit. Par conséquent, il ne faut pas se plaindre de l’hypnose, mais se plaindre de l’impatience autour de cette dernière «
Il est également fondamental de faire la distinction entre hypnose et suggestion. Les suggestions peuvent induire l’hypnose mais il ne fait aucun doute qu’elles peuvent se méprendre sur ce qui induit l’hypnose et l’état (se référer à “l’état” défini plus haut.)
Le fait de suggérer directement en hypnose renvoi à des pratiques datées et spécifiques. Nous pouvons recourir à la méthode d’hypnose de différentes manières. Il est important de se rappeler que le sujet ne peut accepter que des conseils qui lui conviennent, ou qu’il peut tolérer, et personne ne peut entrer dans un état d’hypnose s’il ne le veut pas. Sans suggestions directes, on peut accepter un patient qui souhaite être hypnotisé.
On peut obtenir l’état hypnotique de façon très simple en fixant l’attention du sujet ce qui entraîne une confusion et lui permet de lâcher prise.
Vous pouvez réaliser l’hypnose d’une manière facile en bloquant l’attention du sujet, cela provoque la confusion de ce dernier qui peut, grâce à cela, se détendre en lâchant prise.
Octave MANONNI, dans une lettre adressée à CHERTOK en 1980 (lors de la dissolution de l’E.F.P., et pendant la période intellectualiste de l’analyse a son apogée), nous permet de présenter notre point de vue et éventuellement de rejeter l’idée que nous avons généralement de l’hypnose :
« Lorsqu’il écrivait par exemple que « l’hypnose est un phénomène qui révolutionne et qui contredit tous nos savoirs théoriques »
Puis dans un commencement qui n’en finit pas (Seuil 1980 page 49,50) :
Il n’est pas aisé de donner une définition du transfert, par exemple, grosso modo, il renvoie à l’affiliation de l’inconscient avec l’analyste. Il est préférable de ne pas trop chercher dans le détail, car la notion de transfert représente la partie qui ne peut pas être théorisée lors de l’analyse.
Dans tous les cas, le transfert représente la propriété restante qui est obtenue par plusieurs soustractions d’éléments. Nous éliminons le diable, les convulsions demeurent. Nous avons éliminé le concept de relique culturelle et maintenu la « magnétisation » (Mesmer). Nous avons éliminé le baquet et nous avons gardé l’hypnose. Nous avons éliminé l’hypnose et le seul élément restant est le transfert.
II – Illustrations quotidiennes de cas d’HYPNOSE
Il s’agit d’un phénomène psychologique plus commun que nous pouvons le penser.
– Ayrton SENNA – Monaco (le Monde 14-05-1991):
Ayrton Senna s’est retrouvé plusieurs fois dans des états dits seconds lorsqu’il conduit, il a en effet connu cet état lors du deuxième tour de qualification du Grand Prix de Monaco 1988.
« Les pilotes avaient carte blanche concernant le nombre de tour ils voulaient faire car ils ne disposaient pas d’assez d’adhérence de pneus pour être qualifiés. »
« J’ai terminé un tour de piste suivi d’un second confie-t-il. J’avais la pole mais j’ai insisté pour creuser davantage mon avance. J’avais deux secondes d’avance à chaque virage. Je les prenais plus vite que mes concurrents et que mon équipier (Alain PROST) qui avait pourtant le même véhicule que moi. Ce n’est pas lui qui était lent, mais moi qui roulais à une vitesse bien supérieure à ce dont j’avais d’habitude. Pendant un instant, j’avais la sensation de simplement glisser sur un circuit qui n’en était plus un pour moi, j’avais l’impression d’être une une luge, en tout cas, cela y ressemblait davantage. C’est soudainement que j’ai réalisé que j’avais franchis la limite que je définissais comme “prudente. »
« C’est seulement lorsque j’ai ressenti cela que j’ai immédiatement décéléré. Même si tout se passait sans problèmes, j’ai pris conscience que j’avais touché du doigt quelque chose d’inédit et hors de contrôle puisque inconnu. Je suis retourné tranquillement aux stands en songeant : « Ce jour est particulier. Il ne faut plus y retourner. Tu as atteint un seuil de vulnérabilité. Tu te mets dans une situation où tu as presque laissé les commandes à ton inconscient.”
D’autres exemples :
Gérard ALBOL.
– Plus communément, et en restant dans le même domaine, c’est comme lorsque vous allez quelque part avec votre voiture et que vous vous évadez dans vos pensées. Il peut arriver que vous ne vous souveniez même plus du chemin emprunté.
– Nous retrouvons également cela dans le rapport des indiens et des building de 300 m de haut, (émission USHUAIA avec Nicolas HULOT.)
– Lorsque des patients se trouvent légèrement en transe.
– L’hypnothérapeute et une sorte d’attention qui flotte en compagnie de certains sujets, on a l’impression de s’endormir.
– Enfin lorsque la suggestion intervient : l’institution d’un dispositif analytique; c’est à dire : “Dites ce qui vous vient”, combien de rendez-vous, discussion autour de la rémunération prévue etc…)
– Lors de chirurgies diverses : Même en étant dans un coma dû à l’anesthésie, les dires du personnel de santé accompagnant ont des effets sur l’état du patient.
III – L’Hypnose selon FREUD
FREUD a, pour commencé, appliqué l’hypnose selon l’approche de BERHNEIM et emploie la suggestion directe. Par la suite, il s’est intéressé à celle utilisée par BREUER. En dépit du fait qu’il n’est pas en accord avec l’utilisation de la suggestion de BERHNEIM, FREUD liera l’hypnose et la suggestion.
a) Son dernier texte : SOME ELEMENTARY LESSONS IN PSYCHOANALYSIS
[Résultat, idées, Problèmes II p. 293, 294].
Cela représente le commencement de la seconde version de l’Abrégé ( juin 1938).
FREUD est mort le 23 septembre 1939. Dans son dernier texte, il reconnaît et rappel que l’hypnose a été un outil sans précédent pour lui; elle lui a permis d’étendre ses connaissances comme celles liées à l’ICS qu’il a découvert en pratiquant l’hypnose ainsi que la suggestion.
« On peut prouver expérimentalement chez des personnes plongées dans l’hypnose qu’il y a des actes psychiques inconscients et que l’être-conscient n’est pas une condition indispensable de l’activité. Qui a assisté à une telle expérience en a reçu une impression inoubliable et y a gagné une conviction inébranlable.
Nous pouvons prouver par des expériences qu’il existe un comportement psychologique inconscient chez les personnes qui tombent dans un état hypnotique, et la conscience n’est pas une modalité nécessaire pour cette activité. Ceux qui participent à cette expérience auront en souvenir une impression inoubliable et accèderont à une certitude indiscutable.
Voilà la manière dont cela peut se dérouler :
Un médecin se rend dans une chambre d’un patient de l’hôpital. Il dépose son parapluie dans un recoin de la chambre, non dissimulé, il met l’un des patients dans un état hypnotique et lui dit : « Dans l’immédiat, je dois partir, quand je vais revenir, vous me rejoindrez et metterez ce parapluie au-dessus de ma tête.”
Sur ce, le docteur et ses collègues quittent la pièce. Au moment ou ils reviennent, le patient, maintenant réveillé, exécute immédiatement ce qu’on l’a chargé de faire sous hypnose. On lui demande pourquoi il agit comme cela : « enfin, qu’êtes vous en train de faire là ? Qu’est-ce que cela veut dire ? » Cela crée une sensation de malaise instantané pour le sujet et qu’il bégaie quelque chose comme : « En fait, Docteur, j’ai vu qu’il pleuvait à l’extérieur et me suis dit que vous alliez ouvrir votre parapluie directement dans la pièce avant d’en sortir ». Cela est une justification manifestement insuffisante, que le patient aura inventé sur le vif pour expliquer au mieux son comportement étrange. Il ne sait en réalité pas la raison pour laquelle il agit de la sorte. En revanche, le spectateur de cette scène la connaît. En effet, il était là pendant que le patient a recueilli la suggestion qu’il a fini par suivre alors qu’il ne savait rien de la présence de telles suggestions dans son subconscient.
b) Un des premiers textes dans R.I.P. I p.31 en 1892 « Un cas de guérison par l’Hypnose »
C’est dans une étude comme celle-ci que l’on va découvrir la façon dont vont se séparer les termes hypnose et psychanalyse.
La patiente est une femme appartenant à une famille amie de FREUD. Elle ne parvient pas à allaiter son deuxième enfant. Mise sous hypnose par Freud, il lui a suffit de seulement deux rendez-vous pour qu’elle soit entièrement rétablie.
Nous retrouvons cette femme, seulement une année après pour le même soucis mais avec son troisième enfant. De nouveau, il suffit de deux séances pour qu’elle atteigne une guérison totale.
Dans ce cas, Freud utilise une forme d’hypnose qui consiste à suggérer massivement des choses au patient. Cette technique lui provient de Bernheim : “Vos symptômes vont disparaître car vous êtes en train de dormir.”
FREUD commente dans R.I.P. I p. 35 :
“Je trouve insondable et troublant qu’il ne soit pas question entre nous d’échanger au sujet de cet excellent résultat.”
La patiente commente :
“Puis, voyant la répétition de réussites, les deux conjoints se sont dégelés et ont reconnu leur motivation de se comporter comme tel avec moi. La dame a dit qu’elle a eu honte de voir que des choses comme l’hypnose sont utiles dans des situations où elle même ne pouvait rien faire. Hors, je ne pense pas qu’elle ou son mari aient vaincu leur aversion pour l’hypnose.”
Nous pouvons donc relever une hypothèse :
Est-ce que FREUD ne reprend pas cette phrase pour lui même ? Il est alors incapable d’expliquer ce qu’il s’est passé, et ne peut donc rien en dire. C’est dans la seconde partie du texte -8 p au lieu de 5 p-.où il va tenter d’expliquer ce qui a pu arriver :
“Maintenant, permettez-moi de discuter du mécanisme psychologique de cette maladie provoqué par cette suggestion chez cette patiente. Comme dans d’autres situations, je n’ai aucune information directe à ce sujet, mais je peux seulement tenter de l’imaginer.”
Il proposera ensuite le concept de réticence hystérique dite “contre volonté hystérique”, et il oppose cette dernière à la faiblesse de la volonté au sein de la neurasthénie.
Cela renvoie à une faiblesse de la volonté et distorsion hystérique de la volonté: C’est une différenciation nommée “clivage” (elle souhaiterait mais ne peut pas) nous sommes au milieu de la méthode théorique. Il suffit de rapporter les faits qui ont eu lieu.
Cela ne nous explique pas tout réellement, mais c’est une méthode très intéressante. En tant que méthode, bien sûr.
Conclusion : j’ai remarqué un contraste entre la première partie qui est à la fois surprenante, bizarre et invraisemblable et la seconde partie – on peut dire qu’il y a une étape causale, intéressante.
À la fin du texte, il a évoqué une autre situation. La patiente, avec claque sa langue de façon un peu spéciale ouvrit soudainement ses lèvres tremblantes et tendues. La patiente était Emmy VON N, et son état a été discuté en détail dans l’étude sur la maladie dite hystériqe (p. 39):
« Ne dites rien, ne faites aucun gestes et ne touchez a rien.”
Cela est prononcé dans un moment de délire comme une sorte de “pare-intrusion”. Ensuite, tout s’apaise. Freud essaie donc d’analyser le claquement de langue en état d’hypnose et dit p. 39 :
« En état hypnotique, cette patiente – sans suggestion de personne – avait immédiatement récupéré toute ses capacités mnésiques. Je me suis dis : Sa conscience dans son entièreté était rétrécie pendant la veille. Elle répondit tout de suite : » Lorsque mon plus jeune enfant était très malade, il a eu des crises convulsives toute la journée et s’est finalement endormi la nuit, alors que je le regardais dormir, je me suis dit: maintenant, tu dois être très silencieuse pour ne surtout pas que ton enfant de réveille, donc … c’était la première fois qu’est apparu ce claquement. Puis, cela a fini par passer. Mais quelques années plus tard, quand nous avons roulé une nuit dans la forêt voisine, un énorme orage s’est déclaré et le tonnerre a bien failli nous frapper. Un tronc d’arbre a été touché et cela a obligé le cocher à retenir les chevaux. Je me suis dit: – Tu ne dois absolument pas crier ou le cheval aura peur. C’est alors qu le claquement est réapparu et est resté jusqu’à présent.”
Je me suis convaincu que le claquement ne constituait en rien un tic car, parce qu’elle a pu revenir à ses racines, elle a éliminé ce désagrément et ce pendant plusieurs années et tout le long de son suivi auprès de moi. (p. 40)
IV – La séparation de l’hypnose et de la psychanalyse
Cette coupure s’est produite dans les années 1895.
FREUD dans Introduction à la psychanalyse p. 273
« Par conséquent, j’ai le droit de dire que la psychanalyse n’est efficace que le jour où nous abandonnons l’idée d’utiliser l’hypnose. »
FREUD dans Technique Psychanalytique – Conseil au Médecin p. 69
En réalité, les psychothérapeutes n’ont aucune objection à assembler une certaine quantité d’étude avec certains traitements thérapeutiques recommandés afin d’avoir plus vite des résultats de traitement brevetés. […] Cependant, le praticien doit être personnellement conscient de sa façon de faire les choses, et le plus important est qu’il ne confonde pas la méthode dont il se sert avec la véritable psychanalyse.
Puis LACAN qui demandait pendant un séminaire sur les 4 concepts fondamentaux de la psychanalyse :
« Tout le monde sait il que c’est en se différenciant de l’hypnose que l’analyse s’est érigée ? » (1973, p. 245).
Nous pouvons donc dire simplement que lorsqu’il n’y a pas d’hypnose, il n’y a pas en réalité pas de suggestion.
A noter
Ce sont des faits reconnus et acceptés par tous les groupes d’analyse et institutions, bien qu’il existe des différences entre eux. Ils sont tous entendus et en accord au sujet de la fracture épistémologique de G. BACHELARD ou la fracture épistémologique d’ALTHUSSER.
– Cependant, il demeure une exception : Sandor FERENCZI qui est analyste, écrit une étude en collaboration avec 0. RANK : « Perspective de la Psychanalyse, sur l’interdépendance de la théorie et de la pratique ». [FERENCZI oeuvres complètes Tome 111. 1924]
Se sont seulement les chapitre 1, 3, 5 qui seront édités. Les -chapitres 2, 4, 6 dans lesquels il tente de placer de nouveau l’hypnose au service de la psychanalyse, resteront dans l’ombre et ne paraîtront pas. Il sera attrayant de lire la correspondance FREUD/FERENCZI qui sera bientôt éditée.
FREUD a rend à l’Hypnose ce qu’il lui doit et ce jusqu’à sa mort. cf le texte de 1938.
Par exemple, dans la notion d’inconscient dans [le moi et le Ca (1923) (p.223)] :
“Concernant la majorité des personnes ayant une culture philosophique, l’idée d’un fait psychologique inconscient est tellement incroyable qu’elle semble être défendable par une logique élémentaire et aisée. Selon moi, c’est très simple, car ils n’ont jamais étudié les phénomènes majeurs de l’hypnose et du rêve, sauf pour toute mention de pathologies, ils ont imposé un tel concept. En ce qui les concerne, leur psychologie de la conscience ne peut résoudre les soucis qui entoure l’hypnose et le rêve.”
La notion d’ICS est surtout démontrée par suggestion Post hypnotique. (cf Métapsychologie p.70) :
“De plus, l’expérience hypnotique, et surtout le concept de suggestion posthypnotique, ont prouvé de manière évidente l’existence et le modèle d’efficacité de l’inconscient psychique avant même l’âge de la psychanalyse.”
Il est utile de constater que la notion de “coupure épistémologique” qui est en réalité, la source d’une pensée théorique, de voir ce que cette cassure devient dans un texte de 1921 « Psychologie des foules et Analyse du Moi ».
En reprenant le déroulé de l’article de FREUD :
1) FREUD va critiquer la théorie de la suggestion (TARDE LE BON ou BERNHEIM.)
Il réfute le développement de la suggestion hypnotique des foules par la théorie de la suggestion. cela est une référence aux expériences de BERNHEIM, et il se souvient: [dans Essais de Psychanalyse p. 149 et 150].
« Mais je n’ai pas oublié l’hostilité sourde que j’ai vécu dans une tyrannie de cette suggestion. Quand un patient qui ne fait pas preuve de docilité s’apostrophait : Enfin, que faites-vous? Vous faites de la contre-suggestion !
Je me dis, cela est de toute évidence injuste et violent. Lorsque quelqu’un essaie de soulever une contre suggestion par des suggestions, la personne a bien sûr le droit de faire une contre-suggestion. Ensuite, ma résistance devient un fait d’opposition, c’est-à-dire que la suggestion, même si elle explique tout, doit continuer d’être expliquée.”
et plus loin
« Si désormais, après être resté à distance pendant trente ans, je reviens de nouveau sur la suggestion (avec toutes les énigmes encore présentes autour d’elle) , je peux dire que rien de toutes ces études n’a réellement changé quelque chose.».
Dans sa conclusion, il dit :
“Le fondement de la suggestion repose sur diverses inspirations qui n’ont pas vraiment de fondements logiques suffisants et aucunes réponses tangibles n’ont déjà été rendues.” (p 150)
2) FREUD développe la théorie de la libido afin d’expliquer les manifestations de faits de psychologie de foule.
– Théorie qu’il applique avec excellence à l’église et à l’armée. En effet, ces deux institutions représentent deux foules avec de nombreuses particularités. A partir de ce point de vue, il sera alors en contact avec les foules qui ont des leaders et celles sans leaders.
3) FREUD aborde alors la question de l’identification (chap 7)
La théorie du désir sexuel est très appropriée, tant qu’il s’agit d’un thème moniste et épanouissant (attente, pulsion), c’est-à-dire que la relation avec les autres ne changera qu’après coup.
Mais Freud a souligné que le problème des liens sociaux et des liens émotionnels et affectifs (gefühlsbindung) conduisent à la nécessité d’être une altération primitive par un tier (identification primaire), et ce, bien avant de construire le dit “moi” et bien avant le triangle d’oedipe.
Il s’agit d’un rapport d’identification antérieur à l’opposition du Moi et de l’Objet et donc aussi bien à tout lien libidinal d’objet.
Il est question du rapport d’identification avant que le moi ne se confronte à l’objet et correspond donc également au lien libidinal de l’objet.
FREUD dans – essais de psychanalyse (p. 69)
« L’identification est la forme la plus précoce, la plus originaire du lien affectif ».
– Dans essais le Moi et le Ca (p. 243)
“Cela nous renvoie au commencement du moi idéal, parce que derrière cet l’idéal du moi se trouve la première et la plus importante identité individuelle; c’est en fait, lorsque l’on s’identifie personnellement au père préhistoire – voir la note 1 peut être plus prudent de signifier aux parents qu’il s’agit d’identification – Tout d’abord, cela ne semble pas être le résultat ou l’aboutissement de l’investissement objet, c’est une identification directe et imminente, plus tôt que tout investissement objet. Cependant, la sélection d’objets appartenant au premier cycle sexuel et impliquant des parents, semblent trouver leurs propres résultats dans cette reconnaissance dans le processus normal, renforçant ainsi la l’identification primaire.”
Commentaire de BORSCH JACOBSEN de cette phrase L’identification comme la forme “la plus originaire du lien affectif” [dans l’hypnose et Psychanalyse p. 2,00].
« Ou bien cette phrase ne veut rien dire ou bien elle signifie que l’origine et donc l’ « essence » de l’affect est à chercher du côté d’un rapport qui n’est justement pas la relation d’un sujet à un objet. L’affect, étant lien affectif, ne vient pas de « moi » (ce n’est pas « moi-même » qui m’auto-affecte): il n’est donc pas cette immanence à soi (Henry, 1963) stigmatisée par LACAN. Inversement, étant lien identificatoire il ne vient pas non plus de l’ « objet » -puisque cet « objet », c’est « moi »; je m’aime et me hais en lui, m’angoisse pour moi-même dans la panique qu’il me communique, déplore ma propre mort dans le deuil et la culpabilité qui suivent sa dévoration, etc. Tout affect suppose cette indistinction du moi et de l’objet, du moi et de l’autre. En ce sens, ce n’est jamais un « sujet » qui éprouve un affect. Il y faut toujours une identification qui est une altération, une altération qui est une identification : l’affect n’est propre à personne, à aucun « individu » monadique ».
« Ou alors cette phrase ne signifie rien dire ou alors elle voudrait dire que le commencement ou disons plutôt l’ « essence » de l’affect est à découvrir au sein d’un rapport qui ne représente pas le lien entre un individu et un objet. L’affect, représentant un lien affectif, ne provient pas de « moi » (« moi-même » ne m’auto-affecte pas): il ne représente donc pas cette inhérence à soi-même (Henry, 1963) que LACAN stigmatise.
A l’inverse, représentant un lien identificatoire, il n’est pas à la source de l’ « objet » car ce dit « objet », c’est en réalité le « moi »; on s’aime et se déteste au travers de cet objet, on s’inquiète pour nous-même dans l’angoisse qu’il peut nous transmettre, cet objet peut s’attrister de notre propre mort dans le deuil et la culpabilité qui arrive après son auto-destruction, etc. Chaques choses qui peuvent nous affecter supposent une indistinction du moi et de l’objet, du moi et d’une autre personne. Cette signification ne représente jamais un « sujet » qui se trouve affectée. Il doit toujours y avoir une identification représentant une altération, et inversement : “l’affect énoncé n’est pas propre à quelqu’un en particulier, à aucun « individu » monadique ».
4) C’est à ce moment là que FREUD fait de l’Hypnose le paradigme, le modèle du rapport à l’autre. [dans essais Psychologie des foules p. 179] :
“Nous pouvons dire que l’état d’amour reste proche à celui de l’hypnose. L’accord entre les deux est évident. Cela représente le même effet docile, le même manque de critique vers les hypnotiseurs ainsi que celles des objets aimés. Comme le fait d’absorber l’initiative personnelle; il ne fait pas de doute que l’hypnotiseur a remplacé l’idéal du moi. En bref, en hypnose, cette relation est encore plus claire et plus étroite, il est donc préférable d’expliquer l’état d’amour par l’hypnose que vice versa.”
FREUD ajouter dans le même écrit (P. 180) :
« L’hypnose – résorberait, de façon aisée, le problème posé par la constitution libidinale de la foule si elle n’a toujours pas la particularité de contourner l’explicitation raisonnée donnée jusqu’à maintenant, – elle est dans un état d’exclusion et montre directement la tendance dite sexuelle. Nous reconnaissons qu’elle cache encore énormément d’éléments qui sont encore mal compris et mystérieux. «
Enfin, dans le même écrit (p. 196)
« L’hypnose aspire, à raison, à cette désignation : la foule à deux ».
FREUD ajoute une note au sujet de la suggestion où il différencie l’Hypnose et la Suggestion (p. 196/197) :
« D’après Bernheim, le phénomène de l’hypnose doit être dérivé du facteur de suggestion , qui ne peut être plus clair. Nous concernant, nous avons conclu que cette suggestion est un réel manifeste (demeurant partiel) de l’état hypnotique, La véritable base de cet état hypnotique est un maintien inconscient, issu de l’histoire de la famille et de son origine. «
Donc, FREUD rassemble le concept de lien affectif à celui d’autrui à l’Hypnose. Nous pouvons en ressortir deux soucis principaux :
* Une remise en cause du “ présupposé libidinal”
* la question du lien affectif à autrui – toujours considérée comme une énigme et encore emplie d’incertitudes – est reposée.
Il n’a jamais été question de rejeter le concept de la suggestion ni de supprimer l’énigme autour de la suggestion dans l’hypnose. FREUD créer polémique en réfutant et à raison, le concept de la théorie de la suggestion et revient sur l’hypnose.Nous pouvons effectivement nous questionner à ce sujet..
V – Liens entre la notion de Transfert et l’Hypnose
Pour introduire cette question une citation de FREUD qui met sur le même plan le rapport hypnotique et le transfert.
Afin d’introduire le problème posé, nous nous référerons à une phrase de FREUD qui place le rapport de l’hypnose et le transfert sur la même base.
[Psychologie des foules et analyse du Moi -p. 194]
“ De manière inconsciente, il peut arriver qu’un individu placé en état d’hypnose, place son entière attention sur la personne qui l’hypnotise. Elle peut se situer d’elle même dans une position de rapport hypnotique et donc de tranfert.”
– Nous pouvons dégager les raisons pour lesquelles FREUD à décidé de s’éloigner de l’hypnose, jusqu’à la supprimer totalement de ses pratiques.
L’hypnose n’entraîne qu’une rémission temporaire des symptômes, est impuissante à vaincre la résistance-de certains sujets et paradoxalement l’hypnose empêcherait d’analyser cette résistance en la supprimant ; elle supprime la résistance et la renvoie à un endroit impénétrable (cf Introduction psychanalyse p. 273).
L’hypnose ne peut que conduire à un soulagement temporaire des différents diagnostics donnés et ne peut pas surmonter la résistance chez certains sujets, l’hypnose supprime cette résistance, rendant impossible l’analyse de cette dernière ; elle élimine la résistance et la renvoie à un lieu en quelque sorte imperméable (voir page 273 de « Introduction à la psychanalyse »).
Nous pouvons développer cette idée par deux idées :
– On ne peut pas hypnotiser tout le monde.
– Il est rare d’entrer en état hypnotique profond.
N’oublions pas qu’avant que FREUD élabore la psychanalyse à proprement parlé, il créer deux méthodes transitoires
a) La Druckméthode : qui renvoie au fait de mettre une main sur le front par exemple (cf Emmy Von N ESH p. 39)
b) La notion de concentration où l’on peut retrouver Lucy R, c’est une patiente qui a pu rétorquer qu’elle ne “dormait pas” à FREUD lorsqu’il tentait de la mettre en état d’hypnose.
« Donc, quand une première tentative n’aboutissait ni au somnambulisme,. ni à des modifications somatiques nettes, j’abandonnais en apparence l’hypnose pour n’exiger que la concentration et ordonnait au malade de s’allonger et de fermer les yeux, afin d’obtenir celle-ci. Sans doute suis-je parvenu ainsi à obtenir le degré le plus élevé possible d’hypnose ».
« Par conséquent, lorsque la première tentative n’a pas provoqué de somnambulisme, ou afin de déterminer les changements physiques visibles, j’ai manifestement abandonné l’hypnose et je n’ai eu besoin que de demander aux sujets de rester concentré tout en ordonnant au patient de se coucher et de fermer les yeux pour obtenir le résultat de l’hypnose. » Selon moi, j’ai réussi à atteindre le plus haut niveau d’hypnose de cette façon. «
* Le chemin vers la cure Hypno-cathartique à la psychanalyse
FREUD juste après BREUER s’attaque à la méthode hypno-cathartique (Ma vie et la psychanalyse p. 28) :
« C’est un problème qui relie les symptômes hystériques aux impressions de vie, qui sont soulagées par la reproduction de l’état hypnotique, dans un processus psychologique de déstructuration et de réorganisation appelé statu nascendi ».
Ils ont rejoué l’événement avec l’intensité du premier moment, non pas de manière représentative, mais dans une manière d’agir (Agieren). Ils imitent les affects de corps et d’âme.
C’est encore la notion de l’affect qui est questionnée. Seules les émotions identificatoires ne peuvent produire des émotions qu’en s’identifiant aux autres, mais dans le sens originel d l’identification.
FREUD et BREUER voient rapidement l’efficacité de la Catharsis mais étrangement, ils changent de terme en le théorisant et l’appelle Diegesis; Cela fait référence au concept de récit, de narration, de rappel ou d’expression verbale d’une remémoration. Comme le souligne LACAN, dans Ecrits p.254 : Fonction et champ de la parole et du langage :
« Cet événement (en partant du principe que c’est un événement traumatique ) a été reconnu pour être le déclencheur des symptômes, c’est que la mise en parole de l’un (dans les histoires narrées par la patiente) désignait la levée de l’autre. Ce que l’on nomme “prise de conscience” garde une forme de panache qui mérite le scepticisme que nous pouvons définir à l’image des codes dits corrects, au stade d’explications qui nous permettent d’être réellement sûr. Les aprioris psychologiques de cette époque étaient contraires à ce que les gens disaient, connaissaient dans la verbalisation, à l’image d’un nouveau “réel”. Il n’en demeure pas moins qu’à l’état hypnotique, il (verbalisation) est séparé de la conscience, et cela suffit à modifier le concept des effets que cela peut avoir. «
Dans quelles mesures FREUD et BREUER admettent-ils que la remémoration consciente d’un événement traumatique malgré le fait que cette dernière se passe pendant l’hypnose, dans l’inconscience et le lâcher prise?
Nous pouvons dire que cela est extrêmement important puisqu’en créant la psychanalyse proprement dite FREUD va sauvegarder uniquement la remémoration consciente. Il abandonne la catharsis pour la Diegesis avec une méthode exclusivement narrative, démimétisée et désaffectisée.
* Le problème posé est le suivant :
En laissant de côté l’hypnose, FREUD se désolidarise de la Mimésis (qui correspond à la Catharsis). Ne pouvons nous pas dire qu’il abandonne ainsi donc la performance des cures ? C’est un sujet qui vaut la peine d’être traité et étudié.
– Question de la Mimésis et de la Catharsis.
La Catharsis nous provient d’Aristote et de ce qu’il a écrit au sujet de l’imitation dramatique par opposition à la narration.Platon, lui, définissait la Catharsis par la Mimésis où l’on peut constater que l’énonciateur joue un rôle plutôt qu’à la Diégésis où il narre ce qui se passe factuellement.
La Mimésis revient à dire que l’auteur acteur tragique énonce son discours en utilisant le nom d’un autre, il l’imite et le mime. L’énonciateur interprète un personnage au niveau le plus fort; il devient et est le personnage. C’est la difficulté qu’entraîne la création théâtrale (Mimésis, c’est une façon de dire : Lexis].
La Mimésis s’oppose donc à la Diégésis qui concorde au récit.
La Mimésis est donc loin des imitations et des simulations. Elle renvoie simplement au fait de s’identifier dans un contexte mimétique hystérique.
La Mimésis peut représenter une citation direct. Par exemple : Un patient mis sous hypnose dit : « je vois une rose», plutôt que de dire “il m’a dit : Vous voyez une rose.”
Le sujet peut s’identifier en hypnose à l’opérateur (hypnotiseur) dans le sens ou la personne mise en état d’hypnose interprète le rôle qu’à créé, pour lui, l’hypnotiseur.
C’est la raison pour laquelle il est très important de faire la différence entre l’Hypnose et la Suggestion. Ce qui est capital, c’est l’écart qui se situe entre lui et ce que lui dit l’hypnotiseur au niveau de sa propre créativité, des créations spontanées, et du jeu de l’hypnotisé.
De la même manière, il faut éviter au maximum de rabaisser la Mimésis à l’imitation en miroir (pour les mêmes raisons).
La Catharsis ou la Mimésis représente un phénomène propre à l’identification qui peut porter sur un rôle dit réel ou mythique accompagné ou pas de l’activité de l’acteur (cf LACAN Ecrits p.255)
Nous revenons donc logiquement à la notion d’identification primaire.
Souvenez vous des propos de FREUD dans Psychologie de foule et Analyse du Moi, dont nous avons parlé plus haut, au sujet de cette identification aux parents de façon indistincte, préexistante à la constitution d’un moi.
« Cela représente une identification directe, c’est immédiat, et davantage prématuré que n’importe quel investissement d’objet ».
B.J. formule cette identification primaire :
« En s’identifiant à un autre non-sujet, le non-sujet devient moi. La fondation elle-même n’a pas de fondement. » L’autre personne que j’ai rejointe en tant que «moi» a disparu depuis le début, et cela dans le passé qui n’a jamais été considéré comme présent.
C’est la raison pour laquelle le dit “passé” est oublié avant que l’on puisse s’en souvenir ou même le refouler. N’appartenant pas au Temps, on peut dire qu’il est présent sans discontinuer et c’est parce qu’on de trouve dans l’hypnose ainsi que dans le transfert.
Nous pouvons retrouver cela chez les personnes atteintes de diverses possessions, celles qui font du somnambulisme, qui sont médium etc… : “c’est n’est pas réellement moi, je suis quelqu’un d’autre”
Les cures hypno-cathartiques peuvent se montrer efficace comme le souligne FREUD : Ce traitement hypnocathartique ne fait que mimer les symptômes qu’il finira par guérir (ESH). Ou comme le dit B.J. : « C’est la Catharsis de la Mimésis par la Mimésis. En fait, la Catharsis des troubles de l’identité par la transe de possession.
Mimesis est un mot joué en sérénade et joué devant les autres. C’est la reconnaissance de l’autre : Lorsque l’on ne fait plus la distinction entre le “Moi” et autrui, c’est à dire entre l’énonciateur et la parole de l’Autre, on devient sujet de l’énoncé «
C’est donc comme cela que que les thérapies conventionnelles désignent les maux comme des possessions (par quelqu’un, par des esprits ou même démons) et elles procèdent à une guérison en paroxysant (sous forme de transe pendant la possession). [Voir le texte de J. FAVRET SAADA les désorceleurs du Bocage].
C’est pour reconnaître ce manque d’identité. La transe se traduit de cette manière. ( je suis quelqu’un d’autre, je ne suis pas Moi).
L’élimination du mal subi par le patient (manque d’identité, folie mimétique) n’est pas vraiment le but de l’hypnose, mais il s’agit pour elle de le prouver au terme de sa spectaculaire dégradation rituelle. La chose la plus importante est que le soutien qui lui est apporté par le biais des thérapies susmentionnées.
François ROUSTANG (In Influence p. 47) a rapporté et commenté l’état de Milton E. ERICKSON (dans Hypnose Thérapeutique Quatre conférences (p. 58) où ce dernier nous démontre un savoir faire artistique autour du symptôme.
Il est question d’une femme souffrant de douleur chronique. Milton ERICKSON utilisera une analogie très simple pour illustrer les mesures que le corps peut prendre pour se protéger de la douleur. Celui qui se cause des callosités pendant son jardinage, qui mange la nourriture épicée se fabrique des callosités sur sa langue. ERICKSON conseille donc à la malade d’appeler des callosités à se mettre au niveau de ses terminaisons nerveuses. Eriksson reconnaîtra qu’il n’y a pas grand chose de scientifique là dedans. Mais cela représente la façon qu’il a de gérer les symptômes, plutôt que d’essayer de provoquer une analgésie ou une anesthésie hypnotique, ce qui n’aurait aucun sens pour la patiente.
« ERICKSON se plaignait des thérapeutes qui « essayent de rassurer leurs patients : ils essayent de déposséder leurs patients de la réalité de leur symptômes plutôt que d’accepter et de travailler avec cette réalité » [M.ERICKSON l’Hypnose Thérapeutique p. 61].
«ERICKSON se plaint du type de thérapeute qui tentent de rassurer ses patients: ils essaient d’ôter aux patients la vérité de leurs symptômes, plutôt que d’accepter et d’utiliser cette réalité. « [M.ERICKSON Therapeutic Hypnosis p. 61].
Commentaire de F. ROUSTANG :
D’après Erickson, la limite du pouvoir du thérapeute représente le fait de reconnaître le pouvoir du malade dans ce qu’il a de plus précieux : ses souffrances. Il ne s’agit pas de s’en débarrasser. Il s’agit plutôt de pouvoir vraiment s’attribuer ces souffrances, alors que jusqu’ici, le patient les subissait. (Dans Influence p48)
L’efficacité des cures :
FREUD pensait que cela relevait de la prise de conscience, hors, elle n’est pas considérée comme telle.
Cela ne représente pas non plus la verbalisation de l’événement sous hypnose comme le disait LACAN.
Cela renvoie davantage à la Mimésis : Le sujet passe par une autre identité. En d’autres termes, les sujets ont utilisé l’imitation pour se laisser parler par les autres. Chaques thérapies ont été accompagnées d’une période de transe dans laquelle le sujet subi une sorte d’évanouissement. [voir ci-dessus MANONNI : le transfert est ce qui nous reste de la possession]
* Le transfert est venu immédiatement déranger le dispositif purement narratif de l’analyse.
Le dispositif de narration de l’analyse à été perturbée directement par le transfert.
1) La notion de transfert est apparue pour la première fois lors des Études sur l’Hystérie, quand FREUD narre le cas de Caecilia. Elle est la malade qui est allée le prendre dans ses bras à la fin de sa séance. [ESH p.245/246]
« Dans cette désunion, que je nomme faux rapports, l’affect est le même que celui qui avait motivé la malade à refuser les désirs interdits. Maintenant que je le sais, tant que ma participation personnelle est impliquée, je vais supposer qu’il existe un transfert ainsi qu’un faux rapport. Étrangement, dans ce cas, les patients sont toujours trompés. «
C’est dans ce même texte qu’il théorise la notion de transfert comme résistance.
2) La patiente Dora : Freud parle de transfert (Dora p.87-88)
« Les transferts représentent de nouvelles versions, des répliques de tendances et de fantasmes qui doivent se réveiller et devenir conscients de ces changements au travers des progrès de l’analyse, qui se caractérise par le remplacement de personnes que les médecins connaissaient auparavant. En d’autres termes, de nombreux états psychiques du passé se rétablissent et cela doit être perçu comme un rapport effectif avec le docteur. Il ne s’agit en rien de vivre cela comme un état passé.”
« Si la névrose peut également être guérie dans une maison de repos qui n’utilise pas la psychanalyse, si on peut dire que l’hystérie a disparue sans aucune méthode psychanalytique mais directement grâce au docteur, si une dépendance aveugle et un attachement permanent se manifeste généralement dans la suggestion hypnotique du patient au médecin, on peut donc prouver de façon scientifique que les symptômes du patient sont soulagés grâce aux transferts qu’il utilise sur la personne du docteur. Le traitement de psychanalyse ne produit pas de transfert, il ne fait que le détecter au même titre que les manifestations psychiques cachées. «
Il y a donc comme un surgissement du rapport hypnotique dépendant, le fait de se soumettre, ainsi que le fait d’être valorisé par un docteur.
3) La relation effective du patient est comprise comme la représentation ou l’imitation déplacée d’un lien affectif à une Personne aimée ou détestée.
“Forcé de rejouer l’ancienne pièce, il l’a copié de manière tangible et actuelle plutôt que de s’en rappeler.” (FREUD dans Laïenanalyse Ma vie et la Psychanalyse p.153).
D’où le fait que le transfert ne représente pas une résistance parmi d’autres mais une résistance directe à l’analyse, la résistance fondammentale. [intervention de MANONNI au séminaire de LACAN sur les Ecrits Techniques où il explique que « la résistance pointe le nez par le bout transférentiel ».]
– L’analyse des résistances devient donc analyse du Transfert. Ce dernier devient alors le déclencheur et la résistance de la thérapie.
C’est à partir de ce moment qu’il est alors difficile de dissocier l’Analyse de l’Hypnose :
Comme le précise ROUSTANG dans « Elle ne le lâche plus »
Peu importe que l’analyste parle ou pas, qu’il suggère ou pas : il est recommandé que le patient ne parle pas d’amour passé, mais plutôt qu’il aime l’analyste, ne songe qu’à lui, qu’il se soumette à ses suggestions, accepte toutes ses explications et ce qu’il interprète, et croit aveuglément en la théorie de la psychanalyse.
Après que FREUD rappelle le régisseur que représente le transfert, tant qu’il reste doux, qu’il est dans la modération, lorsqu’il devient plein de passion et d’hostilité, il deviendra un outil de résistance. (Dans Ma vie et la Psychanalyse p.53)
Il est impossible d’analyser sans utiliser la notion de transfert. Ce n’est pas l’analyste qui créer le transfert, et ce dernier n’apparaît pas non plus seulement lorsqu’il y a analyse. Cependant, l’analyse permet de découvrir et de dissocier du reste le transfert. Tous les Hommes utilise le transfert. C’est le décisionnaire du succès d’un traitement (médical surtout). Il surplombe les relations qu’un individu peut avoir avec ceux qui l’entoure. Il est relativement aisé de voir en lui l’identique facteur de dynamisme que les hypnotiseurs ont appelé “Suggestibilité”, qui représente l’exécutant du rapport hypnotique et de la comédie de laquelle le raisonnement cathartique trouva à se plaindre.
La nouvelle reconnaissance du transfert par les analystes est suggestive de la part du patient, tandis que la suggestion de la part de l’analyste n’est pas intentionnelle.
FREUD dans l’Au-delà du principe du plaisir, In Essais de Psychanalyse p. 57 précise :
La psychanalyse, c’est la même chose que le travail thérapeutique, c’est d’abord un art d’interprétations. Si ce n’est pas clair, nous prenons immédiatement d’autres mesures et recommandons que le patient soit contraint de confirmer les détails de sa mémoire grâce à l’analyste. Cet effort permet a l’attention d’être déplacée vers les résistances du patient. Ensuite, toute la technique consiste à trouver ces résistances le plus rapidement possible, à les présenter au patient, et à l’encourager à l’abandonner en profitant de l’influence qu’une personne peut exercer sur une autre. « La suggestion apparaît alors comme un » transfert « .
Comment distinguer l’analyse de la suggestion ?
De quelle manière peut-on promettre que les remémorations du patient ne soient pas des remémorations de transfert, tel que l’on a pu le voir dans le cas d’Anna 0. ou Emmy VON N. Comme par exemple : « Vous voyez cette rose» … « je vois cette rose».
* A toutes ces problèmes posés, FREUD va répondre par : un transfert dissout
Cette analyse provoque une Névrose de Transfert et rétablit le rapport (d’hypnose), mais il est préférable de la relier au passé du patient pour l’éliminer.
FREUD dans Ma vie et la psychanalyse (p. 54) nous dit :
“Il est très juste de dire que la psychanalyse œuvre également grâce à la suggestion, au même titre que d’autres méthodes de psychothérapies. Hors, la différence est que la décision au sujet du succès de la thérapie ne lui est pas totalement laissée à elle ou au transfert. En fait, elle sert de guide au patient; il est dirigé à parachever une tâche psychique qui surmontera pour lui ses résistances de transfert. Ce dernier, dû à l’analyse, devient alors conscient pour le patient, il s’en retrouve dissolu car le malade est convaincu que, dans son propre transfert, il vit de nouveau des relations dites affectives qui émane de l’investissement de l’objet le plus précoce, provenant du moment refoulé de son enfance.”
Puis, lors de la 28e Conférence d’introduction (p.430), dans laquelle ces questions sont longuement débattues, il est de nouveau affirmé qu’en analyse, « le transfert est dissout » :
Foncièrement, c’est cette dernière caractéristique qui détache le traitement analytique du traitement de pures suggestions, et libère les résultats de l’analyse du soupçon de succès dû à la suggestion. Dans toute autre méthode de traitement de suggestions, la notion de transfert est gérée avec soin et reste inchangée dans l’analyse, elle est elle-même l’objet du traitement et se décompose sous toutes les formes qu’elle peut adopter. À la fin du processus d’analyse, le transfert lui-même doit être rejeté, par conséquent, si un succès durable est obtenu, il ne se fonde pas sur la suggestion mais sur la résolution des faiblesses internes acquises grâce à son aide. «
Nous pouvons donc affirmer que la divergence entre analyse et hypnose repose seulement sur la disparition ou non du transfert. Faire disparaître le transfert c’est placer le patient en narrateur, il doit se remémorer, restituer ce qui a été transféré au malade à ses souvenirs. La psychanalyse doit commencer là où l’hypnose s’arrête. En effet, nous constatons que la psychanalyse commence lorsqu’elle se termine. Ce n’est qu’à cause de la dissipation du transfert que l’hypnose et l’analyse diffèrent.
Comment savoir lorsqu’une analyse est finie, comment déterminer si le transfert est terminé ? Que représentent le transfert ou l’hypnose ? Nous revenons malgré cette étude à l’énigme de départ, c’est à dire au lien affectif (le gefühlsbindung), ce rapport sans rapport à l’autre.
À lui seul, est-il possible qu’il soit dissous dans l’optique selon laquelle il est constitutif du sujet de façon : effaçable, inracontable, impossible à représenter et indissoluble.
Le transfert représente les résistances à la remémoration. L’inconscient s’expose directement dans le transfert, s’y dévoile, mais il le manifeste de manière inconsciente, excluant la remémoration ainsi que la représentation.
Le transfert se mutine au souvenir car il est :
– un transfert d’affect
– sachant que l’affect est toujours perçu dans l’instant présent
– le transfert est intemporel. Il est fait (au sens d’actualiser) dans le présent, en dehors de la mémoire et de la représentation. On peut retrouver la Catharsis et la Mimésis.
Enfin, le transfert est contrôlé par des processus primaires situés dans l’inconscient.
Est-il possible de soulager l’amnésie inconsciente?
(l’Inconscient comme résistance à la remémoration (au-delà p.59)
L’affect peut-il être raconté ?
Le transfert peut-il être supprimé dans sa totalité ?